VOYEUSE, VOLEUSE, MUTANTE

Du 18 au 31 janvier 2025*

*Organisez votre visite selon les heures d’ouverture de la Galerie*

 

VOYEUSE, VOLEUSE, MUTANTE présente la somme des recherches de Sarah Cloutier au terme de sa maîtrise en arts visuels et médiatiques à l’UQAM. Guidée par un désir de représenter la réalité humaine à l’ère du numérique, l’artiste-peintre endosse tour à tour trois postures : celle de voyeuse, de voleuse et de mutante. 

 

« Voyeuse, j’épie les gens, j’absorbe le flux visuel circulant sur les réseaux sociaux et je parcours les sites de streaming fréquentés à profusion : je cherche la répétition des corps, les codes du dévoilement de la chair, l’ancrage des standards occidentaux. Puis, voleuse, je m’approprie et détourne les images sélectionnées, les comportements observés. Je tisse des liens entre eux par le traitement de la matière. Je les fusionne et, mutante, je cherche à créer des amalgames métamorphosés. Tout en étant ancrée dans l’observation du réel, j’utilise la peinture, son potentiel de fiction et ses effets du hasard par la matière pour déconditionner le regard en société de contrôle, d’accélération, de productivité et d’hyper-connectivité. »

 

 



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Voir, voler, muter. De mes yeux, je vois la prolifération des écrans. À travers l’écran, je vois un monde virtuel structurant un mode de vie tangible aliéné. Par mon regard, je ressens jusque dans mon corps les accélérations que provoque l’ère de l’instantanéité : l’accès infini à l’information et à la désinformation; la circulation exponentielle des images numériques et l’impatience qu’elle forge sur notre manière de voir. Je ressens l’hyper-connexion et ses instances de productivité et de consommation, et je vois la détresse inavouée qu’elle engendre chez mes concitoyens et moi-même dans la vie de tous les jours.

 

Le rapport accru, s’approchant de l’indécence, à l’image numérique, me creuse un chemin de plus en plus vital vers le rapport à l’image peinte. En positionnant mon corps, mes bras, mes mains et mon visage devant une surface tangible où je peux spéculer, cadrer, bâtir, colorer, déconstruire, imploser, je prends le temps d’absorber une multitude d’images à la fois tourbillonnantes et fixes, et je les fais muter.

 

Situant ma pratique dans la tradition du réalisme issu du XIXe siècle, ma recherche est guidée par un désir de représenter la réalité humaine à l’ère du numérique. Ma peinture se réapproprie donc la circulation de masse des images numériques et lui donne une dimension matérielle, empressée et critique. Elle répond à la passivité conditionnée que structure l’économie de l’attention à travers l’écran. Elle transforme la vaste diffusion d’images pornographiques alors qu’Internet agit comme catalyseur, démontrant le poids de leur influence sur les représentations du corps. La pornographie, et les images du corps de manière générale, succède à l’histoire de la peinture occidentale. Par son réservoir iconographique véhiculant une abondance de corps nus, l’étude de la peinture permet de remettre en question les biais misogynes, sexistes et hétéronormatifs structurant la pornographie mainstream actuelle. J’interroge notre position de spectateur-voyeur debout devant le tableau, désormais assis devant l’écran.

 

L’objectif de cette recherche-création est de donner corps, à travers mon corps, aux images de la chair sexualisée devenues simples stimuli visuels. Je fais-corps, j’ouvre et je fais muter le flux qui submerge nos yeux, afin qu’il décélère et qu’il endosse de nouvelles significations. À l’heure où tout est disponible, contrôlable, maîtrisable, calculable et prévisible, je m’attarde aux effets du hasard de la matière, aux distorsions des images, aux mutations à la surface de la toile, au glitch, afin d’établir la relation entre le disponible et l’indisponible, entre la réalité et la fiction comme moyen de spéculation.

 

SARAH CLOUTIER _

 

Sarah Cloutier est une artiste peintre basée à Montréal, originaire de Sherbrooke. Elle complète présentement une maîtrise en arts visuels et médiatiques à l’UQAM (Montréal) et elle est diplômée de l’Université Concordia (Montréal) avec une majeure en Beaux-arts et une mineure en Sociologie. Ses recherches artistiques explorent le rôle de la matérialité de la peinture à l’ère du numérique et de l’économie de l’attention. À travers la peinture, elle questionne le regard et fait entrer le présent, vécu et senti, en dialogue avec l’histoire de l’art, passée et construite. Sa peinture interroge l’aliénation du corps et de la pensée en contexte d’hyper-productivité et d’accélération. Son travail a fait l’objet de deux expositions solos, Décélérer le regard par la peinture à l’ère de l’instantanéité (2024) au Centre d’artiste Agrégat, Comprendre qu’on ne comprend rien (2022) à l’Espace Mile End. Ses œuvres ont également fait partie de plusieurs expositions collectives, dont Rêveries chromatiques à la galerie JANO (2024), Peinture fraîche et nouvelle construction à la galerie Art Mûr (2024), Travaux en cours à l’École Supérieure d’art et design de Saint-Étienne en France (2024), Aperception et Ouverture(s) à l’UQAM, L’art qui redonne dans le festival MTL en Art, et le projet d’art public du REM – Programme UniR.

 

 

 

 

INSTAGRAM/ SARAH CLOUTIER

Photo 1.  Détail d’oeuvre, Sarah Cloutier, 2024.

Photo 2. Artist @sarazin_cloutier
@mtlenarts edition 2024